Témoignage

TEMOIGNAGE A BEAUVAL

(pour des jeunes 13-14 ans)

Mes amis, je suis heureux d’être parmi vous aujourd’hui.

Pourquoi êtes-vous ici présents ? Etes-vous à la recherche d’un idéal, c’est bien normal à votre âge ou bien avez-vous un profond désir de trouver une réponse à des questions existentielles ; parmi celles-ci peut-être vous demandez-vous : « pourquoi Dieu est-il si loin et ne me parle-t-il pas ? »

C’est une question que je me suis souvent posée ; qu’est-ce que la parole de Dieu ? Est-ce croire à des mots qu’il nous adresse ou alors… est-ce tout autre chose ?

Dieu nous parle à chacun mais il le fait d’une manière originale et personnelle. C’est un long cheminement, différent pour chacun de nous. Dieu pose des balises sur notre route, des rencontres, des évènements, des personnes. Et un jour, il se révèle… je l’entends…, je le découvre… je le sens… et alors il m’invite à lui répondre en toute liberté.

C’est un de ces évènements au cours duquel Dieu m’a parlé que je voudrais vous raconter.

Cet exposé comprend deux parties : la première est le récit d’une conversion, la mienne. A quelle occasion Dieu m’a-t-il parlé ? La deuxième est le récit de la réponse que j’ai donné à son interpellation.

Je suis né dans une famille de sourds profonds, mes parents et deux frères sont sourds-muets de naissance. J’ai donc eu la chance d’entendre dans une famille de sourds profonds. C’était une chance mais aussi un inconvénient car j’étais probablement malentendant au sein d’une famille de sourds profonds. Je croyais bien connaître le problème de la surdité mais en réalité il a fallu que je devienne totalement sourd pour découvrir ce qu’était la surdité. Comment ai-je vécu cette diminution progressive de mon audition que je ne découvris que vers les 13-14 ans, jusqu’à la perte totale de l’ouïe à 36 ans ? Assez mal car je refusais cette situation. Comme je maîtrisais bien la langue des signes qui était ma langue maternelle, je croyais rendre d’éminents services auprès de mes amis sourds.

C’était pour moi un idéal de service.

J’avais reçu une éducation chrétienne et je poursuivis un peu par habitude une pratique religieuse, mais dans mon for intérieur je n’acceptais pas qu’un Dieu qu’on dit « bon » m’ait enlevé ce que je croyais être mon idéal de service.

Pendant trois ans j’ai vécu replié sur moi-même, ayant érigé une muraille que peu de gens pouvaient franchir. Dans ma tour d’ivoire, j’étais en constante révolte et je dois ici remercier ma famille du soutien énorme qu’elle m’a accordé.

Un jour, alors que nous étions en vacances dans les Pyrénées, je fus poussé – mais par qui ? – à me rendre à Lourdes. J’y allai sans beaucoup de conviction, sûrement pas pour retrouver l’ouïe car je ne crois pas beaucoup aux miracles physiques, mais ce que j’y reçus est tellement extraordinaire qu’il m’est encore maintenant très difficile de l’exprimer.

Quand je fus plongé dans la piscine, il y eut comme un éclair – ce fut mon chemin de Damas – j’avais négligé Dieu et c’est Jésus qui venait à ma rencontre. Il me parlait comme un ami me faisant comprendre que la surdité que je me croyais imposée était un appel à changer, à me convertir. Il m’invitait à assumer ce que je n’avais pas choisi : « quand par tes signes, tu croyais rendre service, tu flattais plutôt ton orgueil ; Ephatta, ouvre-toi, accepte ta surdité, tu entendras bien mieux avec tes yeux, avec ton cœur ». J’ai alors compris que Dieu me voulait autrement disponible, à un niveau plus modeste et cette acceptation a bouleversé toute ma vie ; accepter de renoncer à mes illusions était le début d’une Espérance.

Voilà la fin de la première partie, je suis prêt à répondre à vos questions et dans une deuxième partie, je vous dirai comment j’essaye de vivre concrètement cette conversion.

Moment d’interruption avec questions des jeunes

Dans chaque période essentielle de notre vie il y a un avant et un après…car le problème de la surdité reste pour moi une réalité difficile à vivre.

Dans notre pays, il touche à des degrés divers une personne sur dix. Dans notre monde essentiellement basé sur la communication, l’Eglise privilégie la modalité orale pour ceux qui perçoivent les sons et la langue écrite pour les personnes maîtrisant la lecture. La parole de Dieu n’est donc transmise que partiellement aux personnes en mal d’audition profonde.

« Signes de Foi », dont je fais partie, est un mouvement d’action chrétienne reconnue par le Vicariat de Bruxelles, qui s’occupe principalement des problèmes rencontrés par les personnes sourdes et malentendantes dans leurs rapports avec l’Eglise. Pour les personnes sourdes profondes (de naissance), nous essayons de transmettre le message du Christ en nous exprimant par la langue des signes. L’Eucharistie est traduite une fois par mois en l’église de la Ste-Famille à Woluwe-St-Lambert. Celle-ci possède une boucle d’induction magnétique permettant ainsi d’améliorer la compréhension des personnes portant une prothèse auditive.

Voici quelques mots religieux en langue des signes dont je vous laisse découvrir toute la richesse symbolique :

Dieu, Jésus, Jésus-Christ, Parole, Foi, Croire, Eucharistie, Espérance, Amour, Résurrection, Vie, Grâce, Rendre grâces, Symbole, Alléluia, Hosanna.

Ainsi la parole de Dieu m’a rejoint à travers l’expression de mes mains et de mon corps et cela m’aide à mieux prier.

Ai-je totalement accepté la surdité et ses conséquences ? Non, mais j’ai surtout compris que la Parole de Jésus c’est son Esprit qui se distille d’une manière permanente même si je ne l’entends pas.

Je vous propose pour terminer l’interprétation en langue de signes du chant « Oser la Vie » que certains connaissent probablement.

Je vous remercie de votre bonne attention.